Suppression de la valeur locative

Dossiers - Prises de position

Une suppression qui lèse les propriétaires  genevois

Le peuple se prononcera le 28 septembre 2025 sur la refonte totale du système d’imposition des biens immobiliers – en résidence principale ou secondaire – occupés par leurs propriétaires. La Chambre genevoise immobilière s’oppose avec conviction à ce changement de système d’imposition qui péjore la fiscalité de la majorité des propriétaires genevois.

Au terme d’intenses débats, le Parlement accouchait cet hiver d’un compromis dont les axes principaux sont la suppression de la valeur locative pour les résidences principales et secondaires occupées par les propriétaires mais aussi l’abolition des déductions des frais d’entretien et de la déduction des intérêts passifs des dettes.

La question qui sera soumise au peuple le 28 septembre prochain ne se posera pas en termes aussi directs puisqu’elle prend la forme alambiquée de l’approbation de « l’arrêté fédéral du 20 décembre 2024 relatif à l’impôt immobilier cantonal sur les résidences secondaires ». Techniquement, l’approbation ou non de cet arrêté conditionne l’entrée en vigueur du second projet qui concerne la loi fédérale relative au changement de système d’imposition de la propriété du logement, l’une étant la conséquence de l’autre.

Mais pourquoi la suppression de la valeur locative ne serait-elle pas réjouissante ?

L’abolition de la valeur locative échauffe le débat politique depuis sa création en 1934. Sa mise en place avait d’ailleurs pour but, rappelons-le, de renflouer les caisses de l’État en pleine crise économique mondiale. Ce revenu fictif qui s’ajoute aux autres revenus imposables des propriétaires qui occupent leur propre logement augmente le revenu imposable d’un montant qui peut varier d’un canton à l’autre. À Genève, la valeur locative dépend du questionnaire y relatif qui prend en considération la surface habitable et les qualités du bien. Il existe un système d’indexation indépendant dont le mécanisme est lié à l’évolution des loyers. Dans d’autres cantons, la valeur locative est corrélée à l’estimation fiscale de la propriété.

Cependant, ce sont les conséquences des mesures qui accompagnent cette bonne nouvelle qu’il s’agit d’analyser. Jusqu’à maintenant, le pendant à l’ajout de ce revenu fictif est la déduction possible de charges d’entretien et de rénovation ainsi que la déduction des intérêts passifs. En supprimant cette possibilité pour les logements qui ne sont pas loués, les contribuables perdent une réduction précieuse de leur imposition.

Bien sûr, l’abolition de la valeur locative arrive dans certains cas particuliers à une diminution de l’impôt, mais, majoritairement et sur le long terme, les propriétaires genevois sont perdants.

Ainsi, prenons l’exemple d’un propriétaire d’un appartement qu’il occupe lui-même depuis plus de 10 ans et dont la valeur locative s’élève à CHF 22’117.–. Il bénéficie à Genève d’une déduction pour propre occupation de 40% soit CHF 8’847.–. Ce propriétaire peut également déduire ses frais PPE de CHF 6’701.–, ainsi que ses intérêts hypothécaires de CHF 8’100.–. Dans ce cas, le total des déductions de CHF 23’549.– est supérieur à sa valeur locative et ces charges viendront en diminution d’autres revenus, comme le salaire, les rentes etc. Pour peu qu’il envisage des rénovations ou que les taux hypothécaires augmentent, ce contribuable pourra d’autant plus déduire de ces autres revenus.

Bien sûr, l’abolition de la valeur locative arrive dans certains cas particuliers à une diminution de l’impôt, mais, majoritairement et sur le long terme, les propriétaires genevois sont perdants.

La suppression des frais d’entretien et de rénovation est particulièrement mal venue. Ces déductions influent de manière notable sur l’importance des déductions qu’il est globalement possible d’opérer dans sa déclaration fiscale.

Autre ineptie : la suppression immédiate au niveau de l’impôt fédéral direct de la déductibilité des investissements écologiques et la suppression progressive de cette faculté pour les cantons (jusqu’en 2050). À noter que même si le Canton de Genève se projette pour une suppression progressive la plus tardive possible, il s’agirait de légiférer expressément en ce sens, ce qui pourrait s’avérer scabreux.

Quant aux intérêts passifs, ils ne seront tout simplement plus déductibles et ce pour l’ensemble des dettes et non seulement des prêts hypothécaires (emprunts, crédits à la consommation etc.). Seules des déductions minimes sont maintenues pendant les dix premières années lors d’une première acquisition d’un bien immobilier à usage personnel.

Globalement, la réforme désavantage malheureusement les propriétaires genevois ce que confirment les simulations effectuées par le Département des finances qui indique qu’une application de la nouvelle loi produirait des dizaines de millions de rentrées fiscales supplémentaires pour le Canton et la Confédération.

Enfin, cette réforme donne la possibilité aux Cantons d’introduire un impôt réel sur les résidences secondaires réservées à un usage personnel. Cette mesure est le corollaire de la suppression de la valeur locative et auto-rise à introduire un nouvel impôt supplémentaire sur un bien immobilier utilisé principalement comme résidence secondaire. Il permet de préserver les entrées fiscales des cantons de montagne. Là encore, la fiscalité d’un propriétaire genevois de résidence secondaire pourrait être aggravée.

Nous considérons donc que la réforme proposée est mauvaise et nous appelons à la refuser. 


Depuis plusieurs années, la Chambre immobilière genevoise se bat pour diminuer la charge fiscale des propriétaires. Cependant, le système en place, avec la déductibilité pleine des intérêts passifs des prêts et des frais d’entretien permet d’alléger la charge fiscale tout en préservant le patrimoine bâti, encouragé à être restauré. Lors de son intervention à l’Assemblée générale en juin dernier, M. Gregory Boria a clairement démontré, chiffres à l’appui, que la réforme n’est pas à notre avantage.

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